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Une bonne formation 
sur le modèle allemand

Le système de formation allemand est plus demandé que jamais. Un nombre croissant de pays le prennent pour modèle.

09.11.2012
© altrendo images/Stockbyte

Sergej Majsukow a trouvé un emploi dès la fin de sa formation. Ce jeune homme de 21 ans travaille depuis juillet 2012 à la fabrication de lampes chez Osram, une filiale de Siemens dans sa ville natale de Smolensk. Une transition aussi aisée vers le monde du travail n’est pas la norme en Russie car la plupart des élèves des écoles professionnelles n’ont pratiquement pas de contacts avec l’industrie. À Smolensk, Osram propose une formation en alternance depuis cinq ans. Outre des cours théoriques, la formation prévoit aussi des travaux pratiques en atelier et dans la production. « Les exercices pratiques sont très importants car nous sommes qualifiés quand nous entrons dans la production », dit Majsukow.

Smolensk ou Budapest, Barcelone ou Lisbonne, Puebla ou Shanghai – un nombre croissant de jeunes suit une formation en alternance dans le monde. La Chine, l’Inde, la Russie et nombre de pays latino-américains s’intéressent au modèle allemand riche d’une longue tradition ; et le besoin en information a aussi sensiblement augmenté dans l’Union européenne depuis la crise économique et financière. « Naguère, le mode de formation allemand paraissait exotique », dit Steffen Bayer, responsable du département Formation professionnelle à l’étranger au sein de la DIHK, la Conférence des chambres de l’industrie et du commerce allemandes. « Cela a complètement changé. » La raison principale est le très fort chômage des jeunes en Europe. En moyenne européenne, un quart des moins de 25 ans n’a pas de travail, et même la moitié d’entre eux en Espagne et en Grèce. Une idée s’est implantée dans les pays : s’il y a comparativement peu de jeunes chômeurs en Allemagne, c’est surtout grâce à la formation en alternance. En effet, dès le début, les jeunes en formation sont intégrés au quotidien de leur entreprise. L’État et l’industrie coopèrent étroitement pour déterminer le contenu et la qualité de la formation ainsi que les standards des examens.

L’Espagne est le premier pays qui souhaite transformer son système de formation sur le modèle allemand. Les ministres de l’Éducation allemand et espagnol ont convenu d’une coopération plus forte dans le domaine de la formation professionnelle. Le constructeur automobile Seat est un pionnier en la matière, il forme des jeunes en alternance dans ses sites de production espagnols depuis septembre 2012. « Le niveau technique de nos produits a beaucoup évolué au fil du temps et les aptitudes et la flexibilité de nos collaborateurs doivent être toujours plus grandes », explique le responsable des ressources humaines de Seat, Josef Schelchshorn. « La formation en alternance sur le modèle allemand répond à ces attentes. » Pour concevoir cette formation, Seat s’est fait conseiller par Volkswagen, le groupe mère. Les futurs mécatroniciens automobiles, mécaniciens industriels et électroniciens en technique d’automation passeront désormais la moitié de leur formation de trois ans à l’usine.

Le BIBB, l’Institut fédéral de la formation professionnelle qui étudie et développe la formation professionnelle initiale et continue en Allemagne, accompagnera la transformation du système de formation espagnol. Le BIBB travaille avec quelque 30 organismes partenaires dans le monde, dont plus de la moitié sont européens. Depuis un ou deux ans, la coopération s’est intensifiée avec 
de nombreux partenaires et de nouveaux 
accords ont été conclus avec le Chili, la Colombie et le Mexique. « On ne peut pas appliquer point par point le système allemand aux autres pays », dit Michael Wiechert, le responsable du service Conseil et coopération internationale au BIBB. Mais l’institut peut aider ses partenaires à élaborer les standards de la formation et à fixer les conditions-cadres déterminant le rôle des entreprises. « Le plus important, c’est de s’attacher la 
coopération des entreprises », souligne Wiechert. À l’étranger, on s’étonne souvent que les entreprises allemandes assument 70 % 
des coûts de la formation. « Mais cela est rentable pour les entreprises qui disposent ainsi des bonnes compétences au bon moment et au bon endroit. »

Ce ne sont pas seulement les organismes d’État qui promeuvent l’exportation du système de formation allemand. Nombre d’entreprises allemandes sont actives dans ce domaine depuis longtemps, et ce dans leur propre intérêt. Car leurs sites de production à l’étranger, mais aussi leurs sous-traitants et leurs clients ont besoin de professionnels qualifiés. Les premiers interlocuteurs des entreprises en la matière sont les Chambres allemandes du commerce extérieur (AHK), présentes dans 80 pays. Les AHK ont une belle expérience de la formation en alternance à Shanghai où elles conseillent et accompagnent les entreprises de la région depuis dix ans, ainsi que les AHK de Lisbonne et Porto. Ces dernières forment depuis près de trente ans des mécatroniciens automobiles, des agents commerciaux de l’industrie et des agents hôteliers avec des entreprises allemandes et portugaises. Les centres et les programmes de formation sont connus dans tout le Portugal sont la marque « Dual », 90 % des apprentis sont embauchés par les entreprises. Ce modèle a de bonnes chances 
d’acquérir une importance nationale. En effet, le gouvernement portugais veut implanter à moyen terme un système de formation en alternance.

Pour couvrir ses besoins en jeunes quali­fiés à l’étranger, le groupe Siemens a mis nombre de projets en place. Il forme les jeunes sur de nombreux sites, comme à Smolensk ; en outre, la Siemens Technik-Akademie a élaboré un programme de formation initiale et continue en mécatronique sur quatre continents. Le « Siemens Mechatronic Systems Certification Program“ (SMSCP) pour les futurs techniciens et ingénieurs est proposé depuis 2006, entre autres aux États-Unis, en Afrique du Sud, en Inde, en Malaisie et en Grande-Bretagne. Les enseignants des écoles et établissements supérieurs partenaires sont formés à la Technik-Akademie puis appliquent le programme dans leurs pays d’origine, le certificat délivré est reconnu à l’international. Avec cette méthode, des éléments clés du système allemand de formation en alternance peuvent être transposés sans grand problème dans les autres pays sans être obligé de modifier profondément les structures de formation existante, estime le directeur de la Siemens Technik-Akademie, Stephan Szuppa. « Nous sommes certains que cette graine germera et grandira. »

Miriam Hoffmeyer