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« L’immense importance de la liberté de la presse »

Le journaliste germano-turc Deniz Yücel a été placé en détention provisoire en Turquie. En Allemagne, le monde politique et les citoyens demandent sa libération.

03.03.2017
© dpa - Free Deniz Yücel

Le monde politique et médiatique ainsi que nombre de citoyens en Allemagne demandent expressément la libération du journaliste Deniz Yücel, détenu en Turquie. Le correspondant du quotidien allemand « Die Welt » a d’abord été placé en garde à vue le 17 février, puis, treize jours plus tard, en détention provisoire. Celle-ci durera le temps nécessaire pour que le ministère public présente un acte d’accusation. Or il n’existe pas de délai au cours duquel cela doit se produire. Selon les médias officiels turcs, on reproche à ce journaliste de 43 ans des actes de « propagande en faveur d’une organisation terroriste » et d’incitation de la population à la révolte. M. Yücel avait écrit des articles critiques sur le gouvernement turc dans « Die Welt ». Selon son avocat, il encourt une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à dix ans et demi. M. Yücel, qui s’était rendu volontairement à la justice, est né en Allemagne de parents turcs et possède la nationalité allemande et turque.

Une mise à l’épreuve des relations

Le gouvernement fédéral allemand met tout en œuvre sur le plan diplomatique pour obtenir la libération de M. Yücel  – étant convaincu que ses dires en tant que journaliste sont couverts par la liberté d’opinion et de la presse, inscrite dans la Constitution. La chancelière Angela Merkel s’exprima clairement : « Cette mesure est excessivement dure, surtout que Deniz Yücel s’était rendu volontairement à la justice et soumis à l’enquête. Le gouvernement fédéral attend de la justice turque qu’elle tienne compte, dans son traitement de l’affaire Yücel, de l’immense importance de la liberté de la presse pour toute société démocratique. » Mme Merkel a souligné que le gouvernement fédéral s’engagera en faveur du traitement équitable et conforme à l’Etat de droit de Deniz Yücel.  

« Nous nous engageons avec la plus grande fermeté en faveur d’une libération aussi rapide que possible de Deniz Yücel », a également déclaré le ministre fédéral des Affaires étrangères Sigmar Gabriel. L’ambassadeur avait été convoqué pour un entretien au ministère allemand des Affaires étrangères par le secrétaire d’Etat Walter Lindner. M. Gabriel a fermement souligné que « dans toutes les mesures prises par l’Etat, ce bien précieux qu’est la liberté d’opinion et de la presse doit être préservé, et cela vaut particulièrement pour la justice pénale. Elle ne saurait être utilisée à mauvais escient contre les journalistes dans aucun pays se recommandant de la démocratie et prétendant appliquer les droits de l’homme. » Le ministre allemand des Affaires étrangères estime que, avec cette affaire, « les relations germano-turques connaissent l’une de leur plus grande mise à l’épreuve ».

Des cortèges de voitures et des manifestations silencieuses

On discute beaucoup de l’affaire Yücel dans les médias allemands, les talk-shows, en privé et sur les réseaux sociaux. Sur la plateforme change.org, l’initiative #FreeDeniz a lancé une pétition « pour la liberté d’opinion, de l’information, de la parole et des arts » que des milliers de personnes soutiennent. Les signataires s’engagent en faveur de Deniz Yücel, mais aussi en faveur de tous les journalistes actuellement incarcérés en Turquie. Selon les recherches du quotidien « Frankfurter Allgemeine Zeitung », plus de 160 journalistes sont actuellement emprisonnés en Turquie, soit plus que dans tout autre pays. « Reporters sans frontière » indique que, après la tentative de putsch en juillet 2016, quelque 150 médias ont été fermés en Turquie et plus de 700 cartes de journaliste ont été annulées.  

Le 28 février, des protestations bruyantes se sont déroulées dans une douzaine de villes allemande avec des cortèges de voitures klaxonnant à tout-va. Les manifestants demandaient la libération de M. Yücel et de tous les journalistes emprisonnés en Turquie. Flörsheim, la ville natale de Deniz Yücel, avait lancé cette forme de protestation le week-end précédent. Cette commune de 20.000 habitants, près de Francfort-sur-le-Main, prévoit une manifestation silencieuse le 14 mars devant la salle municipale. Si la détention de Deniz Yücel se prolonge, cette manifestation silencieuse se répétera une fois par mois. Début mars, M. Yücel s’était manifesté depuis sa prison avec une note manuscrite : « Je remercie tous mes amis, mes parents, mes confrères et tous ceux qui interviennent en ma faveur. Croyez-moi : cela fait du bien, cela fait vraiment du bien. »

Le ministre allemand des Affaires étrangères Gabriel sur l’affaire Yücel

L’initiative #FreeDeniz

 

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