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Garantir la sécurité alimentaire : avec des données

Ensemble contre la faim et la malnutrition : en Afrique du Sud, un nouveau Centre germano-africain mise sur les données, la coopération et la relève pour améliorer la sécurité alimentaire.

Clara KrugInterview: Clara Krug, 26.05.2025
L’UKUDLA forme la relève scientifique.
L’UKUDLA forme la relève scientifique. © Adobe Stock

Comment combattre durablement la faim et la malnutrition en Afrique et à travers le monde ? Et quel rôle les analyses modernes de données peuvent-elles jouer à cet égard ? L’université de Hohenheim se penche sur ces questions en coopération avec quatre partenaires de l’enseignement supérieur en Afrique du Sud et au Malawi. Avec la création, en Afrique du Sud, du nouveau Centre d’expertise pour Systèmes de sécurité alimentaire durables et résilients et Science des données appliquée à l’agriculture et à la nutrition (UKUDLA), les partenaires de coopération soulignent leur engagement orienté vers l’avenir. Financé par l’Office allemand d’échanges universitaires (DAAD) avec des fonds du gouvernement allemand et des ministères sud-africains, le Centre vise non seulement à rassembler l’expertise, mais aussi à développer des solutions durables pour garantir la sécurité alimentaire en Afrique et au-delà. Professeure Christine Wieck (Dr. agr.) et Marcus Giese (Dr. agr.) de l’université de Hohenheim s’entretiennent avec deutschland.de sur les objectifs, les défis et la coopération. Wieck dirige le département de politique agricole et de sécurité alimentaire, Giese est gestionnaire de projet du Centre d’expertise.

 

Madame la Professeure Wieck, Monsieur Giese, le nouveau Centre d’expertise vise à donner un coup de pouce à la sécurité alimentaire durable en Afrique. De quelle manière le Centre doit-il marquer la société, la recherche et la politique dans les années à venir ?
Wieck : Notre objectif est de former une relève scientifique en Allemagne et en Afrique qui développe des solutions basées sur des données scientifiquement validées, destinées à la politique et à la société en Afrique subsaharienne. J’aimerais pouvoir rencontrer dans quelques années des professionnels qui diront : « Le programme de certificat du Centre d’expertise m’a ouvert les yeux sur la prise de décision basée sur des données. »

Ces jeunes talents doivent, grâce à leur savoir, devenir eux-mêmes des sources d’impulsion.
Marcus Giese (Dr. agr.), chef de projet UKUDLA

Giese : Nous voulons créer des structures et des réseaux qui continuent d’exister sur le long terme – par le biais de projets de recherche, de programmes de bourses ainsi que d’échanges pour les étudiant·e·s en master, les doctorant·e·s et les post-doctorant·e·s. Ces jeunes talents doivent, grâce à leur savoir, devenir eux-mêmes des sources d’impulsion.

Comment est née l’idée du nouveau Centre d’expertise ?
Wieck : les coopérations entre l’université de Hohenheim et les universités partenaires africaines existent depuis longtemps, aussi car bon nombre d’étudiant·e·s d’Afrique font de la recherche et étudient chez nous. C’est un appel d’offres du DAAD qui a donné le coup d’envoi, auquel nous avons pu répondre avec un consortium établi de partenaires en Afrique du Sud et au Malawi. En déposant notre demande, nous avons délibérément renforcé la composante de la science des données, car elle devient de plus en plus importante pour les systèmes de sécurité alimentaire durables.

Les systèmes de sécurité alimentaire constituent une notion large. Qu’entendez-vous exactement par là ?
Wieck : Les systèmes de sécurité alimentaire et agricole ne comprennent pas seulement la production agricole ou certaines chaînes de valeur ajoutée, mais désignent toute l’interaction entre la production, l’environnement, la société et l’alimentation. L’objectif est de concevoir ces systèmes de façon durable et résistante face à des crises telles que le changement climatique.

Giese : La combinaison avec les sciences des données ouvre de nouvelles possibilités. De grandes quantités de données sur le climat, la population ou la consommation peuvent aider à gérer, par exemple, les besoins en ressources de manière plus précise ou à adapter l’agriculture de façon ciblée aux défis tels que les sécheresses ou le changement démographique.

Les analyses modernes de données jouent un rôle important dans la lutte contre la faim.
Les analyses modernes de données jouent un rôle important dans la lutte contre la faim. © Adobe Stock

Pourquoi la priorité régionale du Centre est-elle d’abord axée sur l’Afrique du Sud ?
Giese : D’abord pour des raisons pratiques : nos universités partenaires se trouvent en Afrique du Sud et au Malawi. Mais leurs systèmes de sécurité alimentaire sont, par ailleurs, exemplaires pour contrer de nombreux défis sur l’ensemble du continent. À l’avenir, le Centre devrait s’ouvrir à d’autres régions africaines.

Quels sont actuellement les plus grands défis auxquels sont confrontés ces systèmes de sécurité alimentaire ?
Wieck : Outre le changement climatique et les phénomènes météorologiques extrêmes, ce sont surtout les défis de la sécurité alimentaire, de la transition économique et des inégalités sociales. En dépit des progrès réalisés, des problèmes massifs subsistent, tant au niveau de l’accès à une alimentation saine que de la conception politique de systèmes de sécurité alimentaire durables.

En Afrique du Sud, les partenaires se complètent idéalement sur le plan technique.
La Professeure Christine Wieck (Dr. agr.), Université de Hohenheim

Qu’est-ce qui rend si précieux vos quatre partenaires africains, les universités sud-africaines du Cap-Occidental, de Pretoria et de Mpumalanga et, au Malawi, l’université de Lilongwe ?
Wieck : En Afrique du Sud, les partenaires se complètent idéalement sur le plan technique : de la biotechnologie et des sciences de l’alimentation jusqu’au savoir-faire étendu dans le domaine de l’élevage et des systèmes agricoles, en passant par la science des données. Les universités, certaines nouvelles, d’autres bien établies, travaillent déjà en étroite collaboration depuis de nombreuses années ; et nous de même, nous coopérons avec elles depuis longtemps, ce qui simplifie considérablement le partenariat. 

Christine Wieck et Marcus Giese de l’UKUDLA
Christine Wieck et Marcus Giese de l’UKUDLA © Je’nine May

Et qu’est-ce qui caractérise l’université de Hohenheim, en tant que partenaire allemand ?
Giese : L’université de Hohenheim est l’une des principales institutions européennes de recherche dans le domaine des sciences agricoles, alimentaires et nutritionnelles, propose en même temps un savoir étendu sur les systèmes de sécurité agricole et alimentaire tropicaux. Notre longue expérience acquise au cours des dix dernières années avec déjà plus de 80 projets de recherche en Afrique, notre compétence concentrée sur le plan régional ainsi que notre large palette interdisciplinaire font de nous un partenaire fiable. Il est important pour cela de collaborer d’égal à égal : nous apprenons autant de nos collègues en Afrique qu’eux de nous. 

Comment la collaboration fonctionne-t-elle dans la pratique ?
Wieck : Le Centre n’est pas une institution isolée ; il est conçu comme un réseau et une plateforme, regroupant les compétences de toutes les universités participantes. Les chaires nouvellement créées dans deux universités sud-africaines sont centrales. Financées par l’Allemagne et l’Afrique du Sud, elles couvrent des thèmes de recherche innovants dans le domaine des systèmes de sécurité alimentaire et des sciences des données. Les doctorant·e·s, post-doctorant·e·s et étudiant·e·s en master bénéficient de bourses et de programmes d’échange internationaux. La recherche a lieu de manière décentralisée sur tous les sites concernés et en étroite coopération. Des ateliers communs, des outils numériques et des projets bilatéraux veillent à ce que le Centre d’expertise soit continuellement stimulé et que le transfert de connaissances entre l’Afrique et l’Europe fasse partie intégrante du travail.

Il est important de collaborer d’égal à égal : nous apprenons autant de nos collègues en Afrique qu’eux de nous. 
Marcus Giese (Dr. agr.), chef de projet UKUDLA

L’un de vos objectifs est de transférer votre travail de recherche dans la pratique. Comment vous assurez-vous que les résultats atteignent réellement leur cible ?
Giese : Nous misons sur le dialogue : par le biais d’ateliers et de formats d’échange réguliers, nous mettons en avant les perspectives de la société, de l’agriculture et de la politique. Dans le même temps, nous souhaitons refléter les résultats de nos recherches de manière ciblée, par exemple en développant des outils numériques orientés vers les applications ou en formulant des recommandations adressées aux décideurs.

Quelle valeur sociale voyez-vous dans l’échange scientifique international ?
Wieck : Les solutions durables pour la sécurité alimentaire, l’adaptation au climat et la gestion des ressources sont des défis planétaires. Nous ne pouvons les relever que par la coopération, l’échange et l’apprentissage mutuel. Des projets tels que notre nouveau Centre d’expertise y contribuent considérablement. 

African German Centre for Sustainable and Resilient Food Systems and Applied Agricultural and Food Data Science (UKUDLA)

L’Office allemand d’échanges universitaires (DAAD) soutient, en collaboration avec des partenaires allemands et sud-africains, un nouveau Centre d’expertise (« Centre d’Excellence ») en Afrique du Sud. Cinq partenaires de projet sont impliqués : l’université allemande de Hohenheim, les universités sud-africaines du Cap-Occidental, de Pretoria et de Mpumalanga ainsi que, au Malawi, l’université de Lilongwe. L’UKUDLA se consacre aux systèmes de sécurité alimentaire durables et utilise la science des données pour améliorer l’agriculture. Son objectif est d’optimiser les systèmes de sécurité alimentaire et de former des spécialistes. Ce Centre soutient des étudiant·e·s et des chercheur·euse·s originaires d’Allemagne et d’Afrique. Le financement du Centre d’expertise repose sur des fonds du gouvernement allemand. Du côté sud-africain, la mise en œuvre du Centre d’expertise est soutenue par la National Research Foundation (NRF) par le biais des fonds du Department of Science, Technology and Innovation (DSTI). Le Centre regroupe les ressources pour offrir un programme de financement complet.