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Pour un ­dialogue des valeurs

Dans de nombreux pays, les représentants religieux ont un contact privilégié avec la population. L’Allemagne veut donc renforcer la coopération avec ces acteurs. 

02.10.2017
Religion-Church-Development-Cooperation
© dpa/Kristin Palitza

Les religions touchent plus de gens par leurs églises et leurs réseaux que toute autre organisation. Et les leaders religieux sont des autorités dans leurs pays. Cela vaut particulièrement dans les pays pauvres où les Églises jouissent souvent d’une plus grande confiance que l’État. C’est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral allemand considère les communautés religieuses comme « une ressource  de ­valeurs essentielle » ayant « une grande force constructive ».

Or la forte influence des représentants des religions s’exprime de manière aussi positive que négative. Ils n’agissent pas automatiquement avec modération par le simple fait que toutes les religions mondiales prêchent un vivre-ensemble solidaire. Certains groupes religieux – comme l’État islamique au Proche-Orient ou la Lord’s Resistance Army en Ouganda – encouragent la violence et l’exercent. Les autorités religieuses peuvent agir « comme des extincteurs ou des accélérateurs d’incendie », dit le ministre fédéral du Développement, Gerd Müller. 

Leur audience étant très large, le ministère fédéral de la Coopération économique et du Développement (BMZ) veut désormais miser plus fortement sur la coopération des acteurs religieux. Et « renforcer ceux qui prônent la paix et la tolérance au sein des religions et en faire des partenaires ». Le BMZ a déjà eu recours aux services des grandes Églises en Allemagne. Mais il n’a pas mis la religion et la coopération des représentants religieux dans les pays partenaires au centre de son action. Cela est en train de changer car « nous avons constaté que nous passions à côté d’un acteur essentiel », dit Bernhard Felmberg, du BMZ. 

Avec les représentants de différentes religions, d’associations humanistes et d’organisations non-­gouvernementales, le BMZ a maintenant élaboré une stratégie pour les rapports avec les représentants religieux. Intitulée « Les religions, des partenaires de la coopération pour le développement », c’est la première stratégie de ce type en Allemagne. Elle établit entre autres comme critères la volonté de changement et le respect des droits de l’homme. « Trouver dans ce domaine des forces modérées qui deviendront des partenaires est incontestablement un défi. Mais nous estimons que cela en vaut la peine », dit M. Felmberg. Certains projets sont déjà en cours : des leaders religieux aident à économiser l’eau en Jordanie ou prononcent des fatwas contre l’excision des filles en Maurétanie. Et, d’après le BMZ, ce n’est qu’un début, aborder le « facteur religieux » doit s’approfondir et se professionnaliser.

Le fort écho rencontré par ce changement de politique en 2014 a surpris le BMZ, « nous avons mis quelque chose en branle », dit M. Felmberg. Cela se voit surtout dans le Partenariat international pour la religion et le développement durable créé par le BMZ. Il compte aujourd’hui plus de 60 membres et partenaires, dont le Programme de développement des Nations unies, la Banque mondiale et l’Islamic Relief.

Tous partagent la conviction qu’on ne peut plus ignorer les communautés religieuses comme partenaires dans le dialogue pour le développement. Surtout dans un monde où l’extrémisme motivé par la religion produit presque chaque jour des nouvelles terrifiantes – que ce soit à Barcelone, Berlin ou Bagdad, contre des chrétiens, des musulmans ou des juifs. Il faut des contrepoids. Et, selon le BMZ, ils peuvent être particulièrement efficaces s’ils proviennent des religions elles-mêmes. « Nous vivons dans un monde empreint de religion », dit Gerd Müller. La coopération pour le développement est donc bien plus que le transfert de technologie ou la construction d’infra­structures. Le ministre accorde aussi de l’importance au dialogue sur les valeurs. 

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