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« Il faut accélérer notre action »

Imme Scholz travaille avec des spécialistes du monde entier à un rapport de l’ONU sur l’application de l’Agenda 2030. 

Interview: Helen Sibum, 10.06.2021
La sociologue et spécialiste de la durabilité Imme Scholz
La sociologue et spécialiste de la durabilité Imme Scholz © Deutsches Institut für Entwicklungspolitik

Les objectifs de l‘Agenda 2030 sont clairs mais comment les atteindre dans le temps imparti ? Un nouveau rapport d’experts doit fournir des approches potentielles. Le Secrétaire général de l‘ONU António Guterres a mis pour cela un comité de quinze personnes en place. Parmi les spécialistes internationaux, on trouve Imme Scholz, directrice adjointe de l’Institut allemand de politique du développement et vice-présidente du Conseil du développement durable.

Mme la professeure Scholz, le prochain rapport sur le développement durable dans le monde auquel vous participez paraîtra en 2023. Face à l’impact de la crise du coronavirus, il ne sera pas spécialement positif, n’est-ce pas ?

On prédit effectivement de fortes régressions, elles sont déjà en partie visibles. La pauvreté, les inégalités et la faim ont augmenté, la santé s’est dégradée. En matière d’éducation, des études montrent que lorsque les enfants ne peuvent aller à l’école pendant longtemps, en raison par exemple de conflits ou de guerre, cela se manifestera plus tard sous forme de pertes de revenus. Ma plus grande crainte est que la pandémie fasse reculer la protection du climat. Nombre de pays du Sud sont déjà surendettés et n’ont pas les ressources nécessaires à la transformation de leurs infrastructures. Les pays industrialisés, par contre, ont des programmes conjoncturels et de reconstruction pour l’après-coronavirus qu’ils pourraient mettre à profit pour s’orienter vers plus de durabilité – mais ils manquent souvent de courage politique pour lancer les transformations nécessaires.

Le rapport du comité d’experts de l’ONU doit soutenir le monde politique dans ses efforts pour atteindre les objectifs de durabilité. Qui compose ce groupe et quel est son rôle ?

Le comité se compose d’expertes et de d’experts en sociologie et en sciences de la nature de toutes les régions du monde. Je le préside avec John Agard, de Trinidad et Tobago. Notre mission est de produire un nouveau rapport indiquant la voie à suivre. Nous voulons poursuivre celle tracée par le dernier rapport, remontant à 2019. Sa grande contribution a été de répartir les 17 objectifs de durabilité en six domaines où il faut faire progresser le développement durable : avec par exemple des systèmes agro-alimentaires durables, l’approvisionnement en énergies renouvelables et une économie qui produit de manière raisonnée et crée des emplois dignes. Le rapport a en outre définit les leviers qui peuvent être utilisés dans ces domaines pour parvenir à des transformations systémiques.

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Quels sont ces leviers ?

Une bonne gouvernance, une politique économique et financière durable, une action individuelle et commune ainsi que le recours à la science, à la technologie et aux innovations. Cette approche a d’ailleurs été choisie dans la nouvelle stratégie allemande de durabilité. Je pense que cela a été possible car le gouvernement fédéral pratique depuis 2002 une politique de durabilité et qu’il est challengé par des citoyennes et des citoyens engagés, par exemple par le Conseil pour le développement durable, le réseau SDSN Germany, la plateforme scientifique Durabilité 2030 et les comités consultatifs scientifiques des différents ministères.

L’Allemagne peut-elle être un exemple en matière de durabilité ?

L’Allemagne a une belle réputation à l’international dans le domaine de la durabilité et la voix de l’Allemagne a du poids. Nombreux sont ceux qui souhaitent échanger avec l’Allemagne. C’est à la fois une chance et une obligation : dans des entretiens avec les experts internationaux qui s’intéressent de près à la politique de durabilité allemande, ils disent souvent qu’ils se seraient attendue à une implémentation plus rapide et plus ambitieuse en Allemagne.

Actuellement, les échanges internationaux entre experts sont difficiles en raison de la pandémie du coronavirus. Comment travaille concrètement le comité de l’ONU ?

Nous sommes naturellement un peu limités dans notre travail parce que nous ne pouvons pas nous rencontrer physiquement. Le fait que nous ayons tous l’expérience du travail à distance nous a certainement aidés. Mais se réunir en visioconférences est très difficile en raison des fuseaux horaires. Nous nous sommes donc répartis en trois groupes de travail.

L’échec des objectifs climatiques et de biodiversité serait fatal.
Imme Scholz, spécialiste du développement durable

Sur quels sujets travaillent-ils ?

Le premier groupe se penche sur les facteurs qui n’ont pas été perçus lors de l’adoption de l‘Agenda 2030 en 2015, comme la tendance croissante à la neutralité climatique et à la numérisation. Le deuxième groupe étudie les enseignements que l’on peut tirer de la crise du coronavirus pour les processus de transformation nécessaires en matière de durabilité. C’est important car il faut accélérer notre action – cela aurait d’ailleurs été nécessaire sans la pandémie du coronavirus car des créneaux temporels se fermeront sinon. Le troisième groupe analyse comment ces leviers peuvent être précisés et utilisés plus efficacement qu’aujourd’hui.

Pensez-vous que les objectifs de l‘Agenda 2030 pourront être atteints à cette date ?

On ne pourra plus atteindre l’objectif consistant à faire disparaître l’extrême pauvreté d’ici à 2030. Cela n’est pas seulement dû à la pandémie – le recul de la pauvreté avait déjà sensiblement ralenti en 2018 et en 2019. Naturellement, on se demande maintenant s’il nous faut choisir des priorités et définir les objectifs qu’il faut absolument atteindre. Je dirais que l’échec des objectifs climatiques et  de biodiversité, notamment, serait fatal. Plus les tendances négatives persistent dans ces domaines, plus elles seront difficiles à arrêter et à renverser.

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