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Emmanuel Kant : le philosophe des Lumières

Emmanuel Kant a transformé la pensée humaine dans le monde entier. Même en ce 300e anniversaire de sa naissance, les œuvres du philosophe allemand restent d’actualité. 

19.04.2024
Statue d’Emmanuel Kant devant l’université de Königsberg (Kaliningrad)
Statue d’Emmanuel Kant devant l’université de Königsberg (Kaliningrad) © picture alliance / imageBROKER

Emmanuel Kant a transformé le monde sans en avoir vu beaucoup. Le philosophe allemand n’a, pour ainsi dire, jamais quitté sa ville natale de Königsberg ; et pourtant, ses écrits ont transformé la pensée humaine dans le monde entier. Kant est considéré comme l’un des philosophes les plus importants du siècle des Lumières : pour beaucoup, ses œuvres sont aujourd’hui toujours d’actualité. Ainsi, afin de célébrer le 300e anniversaire de sa naissance, de grandes expositions, de nombreuses attractions et une cérémonie seront organisées en Allemagne en 2024.

Johannes Heydeck, Emmanuel Kant à son bureau, 1872
Johannes Heydeck, Emmanuel Kant à son bureau, 1872 © Leihgabe Stiftung Königsberg / Ostpreußisches Landesmuseum

Le 22 avril 1724, Emmanuel Kant vit le jour à Königsberg, une ville de Prusse orientale située au bord de la mer Baltique. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la ville devint partie intégrante de l’Union soviétique russe sous le nom de Kaliningrad. Située aujourd’hui entre la Pologne et la Lituanie, elle constitue une exclave de la Russie. À l’époque de Kant, Königsberg était une ville très ouverte et dotée d’une excellente université, indique Agnieszka Lulinska, commissaire d’une exposition à la Kunsthalle de Bonn, consacrée au 300e anniversaire de la naissance du philosophe. Ce dernier a enseigné à l’université en tant que professeur de logique et de métaphysique. « Kant est peu sorti de Königsberg, mais il a fait venir le monde à lui », précise Lulinska.

Dans sa ville natale, il a rédigé des œuvres qui, même aujourd’hui, restent des références. « Après Kant, on pensait autrement qu’avant Kant », affirme Thomas Ebers, également commissaire de l’exposition à la Kunsthalle de Bonn. Dans ses écrits, le philosophe s’est avant tout penché sur quatre questions : Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ? Que puis-je espérer ? Qu’est-ce que l’humain ? C’est dans son œuvre la plus connue, la « Critique de la raison pure », considérée comme une référence de la pensée philosophique, qu’il a formulé ses réponses. 

Page de couverture de la première édition de l’œuvre « Kritik der reinen Vernunft » (titre en français : « Critique de la raison pure »)
Page de couverture de la première édition de l’œuvre « Kritik der reinen Vernunft » (titre en français : « Critique de la raison pure ») © Leihgabe Stiftung Königsberg / Ostpreußisches Landesmuseum

Bon nombre des idées de Kant sont toujours d’actualité, notamment sa phrase la plus célèbre : « Aie le courage de te servir de ton propre entendement. » Marcus Willaschek, philosophe et spécialiste de Kant à l’université de Francfort, estime que cette conviction est la plus importante que Kant ait jamais laissée. Elle signifie se rendre compte « que nous sommes responsables et que nous ne pouvons pas nous défaire de notre responsabilité », explique Willaschek à la deuxième chaîne de télévision publique allemande Zweiten Deutschen Fernsehen (ZDF). Par ailleurs, la célèbre question de Kant est « Que dois-je faire ? » et non « De quoi puis-je me plaindre ? ».

Aie le courage de te servir de ton propre entendement.
Emmanuel Kant

Quiconque jette aujourd’hui un regard critique sur Kant ne peut cependant pas non plus ignorer les propos racistes du philosophe. Un projet de recherche de l’université d’Iéna aborde la question du racisme dans les œuvres de la philosophie classique. Kant aurait tenu des propos racistes, mais il s’inscrivait à cet effet dans le contexte de son époque, a souligné Andrea Esser, responsable du projet, à la radio allemande Deutschlandfunk. Elle a précisé que sa recherche n’avait pas pour but de juger des personnes à titre individuel, mais plutôt de comprendre « comment nous devons gérer cet héritage ». 

À l’avenir, le « penseur du monde », qui mourut à Königsberg le 12 février 1804, à presque 80 ans, sera aussi évoqué par le premier musée Kant d’Allemagne. À l’occasion du 300e anniversaire de sa naissance, le musée régional de Prusse orientale de Lunebourg accueille pour la première fois une exposition permanente dédiée au « penseur probablement le plus important de l’époque moderne ». Et Kant continue de susciter des débats. C’est ainsi qu’en 2024, l’écrivain Daniel Kehlmann a publié avec le philosophe Omri Boehm, enseignant à New York, le livre « Der bestirnte Himmel über mir – Ein Gespräch über Kant » (Le ciel étoilé au-dessus de moi : une discussion sur Kant). Dans cet ouvrage, les auteurs cherchent chez Kant des réponses cruciales à des questions actuelles. Kehlmann, qui a lui-même étudié la philosophie, parle de l’influence du philosophe comme suit : « L’une des plus grandes révolutions intellectuelles qu’il y ait jamais eu dans l’histoire de notre espèce. C’était Kant. »