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L’objectif est la sécurité des gens

Faut-il renoncer à des libertés pour une nouvelle stratégie de sécurité nationale ? Christopher Daase, chercheur sur la paix, apporte des réponses.

05.09.2022
Christopher Daase, chercheur sur la paix, à Francfort
Christopher Daase, chercheur sur la paix, à Francfort © Geisler-Fotopress/Kern

Monsieur le professeur Daase, pour qui la stratégie de sécurité nationale doit-elle assurer la sécurité ?
Dans les Etats démocratiques, il s‘agit toujours en fin de compte de la sécurité des citoyens - c’est-à-dire la garantie de leur liberté de mener une vie autodéterminée et digne. Mais pour assurer cette liberté, les institutions sociales et nationales doivent bien fonctionner. C’est pourquoi la sécurité est souvent perçue comme la sécurité de l’Etat dans le sens de l’intégrité territoriale et de l’autodétermination politique. Enfin, la sécurité nationale est toujours au service de la sécurité humaine. La sécurité ne s’arrête toutefois pas aux frontières nationales. Même au-delà de leurs propres intérêts, les Etats démocratiques (et leurs sociétés) ont une certaine responsabilité en ce qui concerne le bien-être des personnes dans le besoin.

De quels dangers doit-elle protéger ?
De multiples dangers menacent la sécurité nationale, sociale et humaine. Les guerres et les conflits en font partie tout comme les crises économiques, la destruction de l’environnement et le changement climatique. Le plus grand défi de la politique de sécurité est de fixer des priorités et de réduire les dangers en évitant d’en augmenter d’autres. Il faut toutefois souvent faire des choix, comme c’est par exemple actuellement le cas, en réduisant le bien-être (donc la sécurité économique) au profit de la politique de défense (donc la sécurité militaire).

La sécurité ne réduit pas seulement la liberté, elle la crée également !
Christopher Daase, chercheur sur la paix

Quelle devrait être la nouvelle politique de défense ?
A l’avenir, la politique de défense va davantage se concentrer sur la défense militaire et la dissuasion. La guerre de la Russie contre l’Ukraine a détruit durablement l’architecture européenne de paix et de sécurité. Cela affecte aussi les relations économiques et sociales – il faudra en venir à un « désengagement contrôlé » afin que l’Allemagne se libère de dépendances unilatérales (par exemple en ce qui concerne la politique énergétique). En même temps, il est important de ne pas passer complètement à la confrontation et de ne pas perdre de vue l’objectif à long terme d’une politique de sécurité coopérative. Pour cela, il est déjà possible de développer des idées sur la manière d’intégrer le réarmement souhaité dans la politique de contrôle des armements afin d’éviter une nouvelle course aux armements.

Présentation de l’étude sur la paix 2022 à Berlin : Christopher Daase, Ursula Schröder, Conrad Schetter et Tobias Debiel lors de la Conférence de presse fédérale
Présentation de l’étude sur la paix 2022 à Berlin : Christopher Daase, Ursula Schröder, Conrad Schetter et Tobias Debiel lors de la Conférence de presse fédérale © Geisler-Fotopress/Kern

A combien de liberté devons-nous renoncer pour la sécurité ?
Traditionnellement, on part du principe que la sécurité est toujours au détriment de la liberté : la police peut fouiller des maisons pour arrêter des voleurs, l’armée peut recruter des soldats pour défendre le pays, l’Etat peut augmenter les impôts pour un meilleur équipement de l’armée. Toutefois, si la sécurité des citoyens est au centre des préoccupations, il ne s’agit pas alors de restreindre mais d’assurer la liberté – c’est-à-dire de pouvoir mener une vie autodéterminée et digne. La sécurité ne réduit pas seulement la liberté, elle la crée également. Cela veut dire que la société doit elle-même décider – que ce soit par le biais d’élections ou de participation au discours politique – quelle politique de sécurité nationale elle considère comme appropriée pour une liberté sociale à définir.

 


Le professeur Christopher Daase est adjoint du conseil d’administration de l’Institut Leibniz Hessische Stiftung Friedens- und Konfliktforschung (HSFK) | Peace Research Institute Frankfurt (PRIF). Il enseigne à l’université Goethe de Francfort.

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