L’art de l’interprétariat de conférence
Jaqueline Klemke interprète en simultané depuis 20 ans. Lisez ici ce qu’elle doit savoir faire en plus du multitasking.
Elle a l’un des métiers les plus stressants au monde : Jaqueline Klemke interprète en simultané de l’allemand vers l’anglais et vice-versa. Lors de conférences internationales sur des sujets complexes, cette Francfortoise est assise très concentrée dans sa cabine et traduit.
Mme Klemke, quelle est la particularité de l’interprétariat en simultané ?
On fait tout en même temps. Pendant que j’écoute, traite les contenus et parle dans la langue-cible, l’intervenant ou l’intervenante continue naturellement de parler. A cela vient s’ajouter le fait que chaque intervenant s’exprime de manière différente ou structure ses pensées différemment. Ces processus simultanés se déroulent en quelques millisecondes.
Que faites-vous quand l’intervenant perd le fil de son allocution ?
Je peux faire quelques circonvolutions rhétoriques sans ajouter d’informations à un endroit ou un autre ou je peux adapter mon rythme de parole jusqu’à ce que l’orateur se soit repris. Mais il y a aussi des moments où l’émotion est plus importante que la langue et les auditeurs doivent la ressentir. L’interprétariat doit dans l’ensemble s’orienter sur le destinataire. Lors d’un congrès sur l’accompagnement du deuil, on doit parler différemment que lors d’un congrès sur la finance où il y va de faits, de chiffres et de données.
Comment abordez-vous le fait que la syntaxe de l’anglais est très différente de celle de l’allemand ?
Soit on connaît le sujet ou l’intervenant et on peut anticiper judicieusement. Mais, en allemand, il peut arriver qu’après un début de phrase comme « Dann haben wir bei dem neuen Projekt… » (Nous avons pour le nouveau projet), plusieurs phrases subordonnées s’ensuivent avant que la phrase s’achève avec « …beschlossen, das Projekt einzustampfen » (décidé de renoncer au projet). Pour que nous, les interprètes, ne galopions pas dans une fausse direction, il nous faut scinder la structure en phrases plus courtes avec des unités de sens que nous pouvons déjà traduire sans falsifier le message.
Qu’est-ce qui vous plait le plus, traduire de l’anglais en allemand ou le contraire ?
De l’allemand vers l’anglais. La langue allemande est très complexe. Cela permet nombre de combinaisons. Certaines personnes parlent de manière très imagée. A cela viennent s’ajouter le style et la syntaxe qui peut être très différente. « La langue des poètes et des penseurs » – ce n’est pas un hasard si l’allemand est appelé ainsi. C’est toujours fascinant pour moi.
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